Publié dans Fantasy, Steampunk

Vaisseau d’Arcane, tome 1 : Les Hurleuses – Adrien Tomas

Illustration de Qistina Khalidah

De quoi ça parle ?

Au Grimmark, la magie peut foudroyer en un éclair. Ses victimes, les Touchés, ne sont plus jamais les mêmes : ils possèdent une incroyable puissance, mais leurs esprits sont à jamais anéantis.

Lorsque son frère Solal est frappé par l’Arcane, Sof, infirmière raisonnable et sans histoire, décide de tout risquer pour le sauver du destin de servitude qui l’attend. Dans leur fuite éperdue à travers les steppes infinies et les forêts boréales, ils découvriront un monde sublime et redoutable.

Mais leur liberté est vue comme un affront, leur existence même comme un blasphème. Dans leur ombre, des factions s’affrontent, tissant autour d’eux un écheveau de machinations dont elles tirent les fils avec une virtuosité machiavélique.

La magie n’est pourtant pas une puissance qui se dompte…

Et c’est bien ?

Nul doute que le résumé est alléchant, en tout cas cette histoire de magie imprévisible et de Touchés dont l’esprit est foudroyé me tentait bien. J’avais, il y a des années, adoré la lecture de Notre-Dame des loups, du même auteur, et même si je savais qu’il avait écrit d’autres textes, je ne m’étais encore jamais penchée sur ses autres récits.

Alors, que dire de Vaisseau d’Arcane ? De prime abord, c’est sans conteste un univers que j’ai adoré découvrir et pour lequel l’imagination de l’auteur m’a plusieurs fois beaucoup plu. Cette histoire de magie imprévisible en fonction des différents endroits du monde est intrigante. Le côté steampunk est très marqué, sans pour autant être outrancier, ce que je reproche parfois à certains récits du genre. J’ai trouvé le principe des Poissons-Crânes absolument génial : un peuple des abysses ayant développé les capacités technologiques pour explorer le monde hostile de la Surface. De nombreux éléments que l’auteur nous dévoile dessus m’ont beaucoup plu : leurs aéroscaphes, nécessaires à leur survie, leur politique, énigmatique, leur hiérarchie sociale. Les personnages que l’on découvre de ce peuple sont aussi plutôt intéressants.

En sus de cet univers, l’auteur développe une riche galerie de personnages. Sof, l’infirmière qui veut désespérément sauver son frère du sort réservé aux Touchés, une vie d’esclavage en vue d’exploiter leur potentiel magique. Nym, jeune assassin énigmatique, « opérateur » au service des Ediles du Grimmark mais qui révèle des ambitions pour le moins mystérieuses et qui dépassent ce qui lui est officiellement demandé. Gabba Do, jeune ambassadeur des abysses qui ne demande qu’à découvrir les humains. Le peuple orc, peuple végétal dont les parias hantent les cimetières de Mithrisias, la capitale… Tout était réunit pour un bon cocktail d’aventure.

Malheureusement, la sauce a mal pris. Si la découverte progressive de l’univers proposé par Adrien Tomas est un coup de coeur, en revanche, plus l’histoire avançait, plus une multitude de petits « couacs » est venue me dérouter. A commencer par Sof. Une jeune femme, infirmière. Un profil peu vu en fantasy et qui m’emballait. Elle est belle, timide mais se révèle très intelligente, très douée, dotée d’une autorité fort utile, très… trop. Malgré les failles que l’auteur tente de lui accoler, elle m’a paru trop parfaite et archétypale, et elle en est venue à m’agacer. Même chose pour Nym, de son vrai nom Hiéronymus Vénoquist, assassin prodige, de manière un peu trop facile et pour lequel je souhaite vraiment me tromper sur ce que nous réservera le tome final – je ne suis pas fan d’amourettes surprises et cela me paraîtrait ajouter un cliché supplémentaire à l’ensemble.

Aux trousses de ce petit monde, un quatuor d’assassins, les anciens compagnons de Nym, décidés à faire respecter leur honneur d’assassins au service des hauts placés du Grimmark. On ne quitte pas leur groupe comme ça. Censés être les meilleurs assassins qui soient, les plus retors, les plus habiles, habitués à traquer leurs proies, ils se comportent de manière qui m’a semblé puérile. Certains passages ont dû être drôles à écrire, et m’ont certes fait rire. Mais l’un de ces spadassins se révèle un crétin fini, et mettre en scène une dispute parce que l’un d’eux a voulu faire du feu pour offrir le thé aux autres alors qu’ils sont en pleine traque m’a surtout fait penser à un épisode de Naheulbeuk (on ne fait pas de feu dans un donjon !) et ne m’a pas semblé très raccord avec le profil initialement présenté. Il en va de même pour le devenir de ce groupe que je n’ai pas trouvé crédible et trop facile.

L’ambassadeur poisson-crâne Gabba Do quant à lui m’a paru trop naïvement naïf. Il était le meilleur de sa promotion mais ne voit pas arriver tout ce qui lui tombe dessus. Même avec l’excuse de la méconnaissance des humains, il est censé avoir été le meilleur « apprenti-ambassadeur » et j’ai eu du mal à croire que le comportement de certains des humains qu’il croise l’aient trompé à ce point. Alors que c’était le personnage qui m’intéressait le plus, il a fini par m’agacer. Les orcs m’ont fait penser aux Trolls d’Arleston et Mourrier, et pareil, pas mal de personnages archétypaux : le guerrier musclé, les anciens, la chamane et une organisation sociale qui m’a parue trop effleurée. Au final, sans être lui-même très original, je crois que le personnage qui m’aura le plus plu reste Magnus, le fiancé de Sof. Je ne m’attendais pas à ce qu’il soit développé, et contre toute attente, je me suis rendu compte que je l’appréciais beaucoup.

L’aventure en elle-même ne m’a pas déplu. Malgré ses défauts, je l’ai lue avec plaisir, mais je n’ai pas arrêté de buter sur un étrange mélange d’inventions que j’ai trouvé super originales et qui m’emballaient à fond, et des scènes ou personnages trop vus et qui auraient mérité un développement peut-être plus profond pour être crédibles avec ce qui nous en est dit et ce que l’on en perçoit. La chose qui sauve, c’est que l’auteur sait ne pas ménager ses personnages et ne caresse pas forcément son lecteur dans le sens du poil. Je lirai certainement la suite, car il s’agit d’une série en deux tomes et que je veux le fin mot de l’histoire. J’espère aussi que l’on aura des explications sur les motivations du gros twist final, car je dois avouer que je ne vois pas quel est l’intérêt des instigateurs de toutes les machinations auxquelles on assiste – je mets ceci sur le compte du fait que je n’ai pas encore toutes les clés.

Une lecture en demie teinte donc, loin d’être déplaisante mais qui m’a déçue sur certains aspects. J’en attendais davantage des personnages, surtout, et j’espère qu’ils gagneront en épaisseur dans le tome suivant.

Note : 3 sur 5.
Publié dans Fantasy, Jeunesse

Les chroniques des temps obscurs, tome 2 : Fils de l’eau – Michelle Paver

De quoi ça parle ?

Torak est un garçon à part. Un garçon qui sait parler aux loups. Un garçon qui doit affronter les Mangeurs d’Ames… au risque de perdre la vie. Le Clan du Loup, auquel il appartient, est menacé par une terrible maladie et la peur ronge la Forêt tout entière. Cet été-là, l’air est irrespirable, comme empoisonné. Nul ne connaît la cause de cette épidémie et seul Torak peut trouver l’antidote. Sa quête le conduit de l’autre côté de la mer, vers les mystérieuses îles du Clan du Phoque. Là-bas, Torak va braver un invisible danger et découvrir un terrible secret. Un secret qui changera sa vie à tout jamais.

Et c’est bien ?

C’est avec plaisir que j’ai retrouvé l’univers de Torak. L’univers de la forêt, des clans, mâtiné de chamanisme et auquel l’autrice ajoute un soupçon de magie particulièrement intéressant et qui fait tout le sel de cet univers.

L’atmosphère de cet ouvrage est bien plus sombre que celle du tome précédent. Malédiction, être inquiétants par l’entremise des Tokoroth, une maladie qui ravage les différents clans. La fuite de Torak dans l’espoir de trouver un remède à tout cela, Torak poursuivi par une menace invisible et malfaisante. Pas mal de passages de son périple rendent toute lecture vespérale un rien angoissante. Cet aspect servi par le style de Michelle Paver, qui a défaut d’être beau, est néanmoins très efficace et fluide.

Plusieurs aspects du tome 1 sont davantage développés et laissent présager des réponses dans les tomes suivants : les fameux Mangeurs d’Ames, dont ont commence à entrevoir les desseins initiaux et actuels, les pouvoirs de Torak, présentés de manière suffisamment subtile pour que l’on n’ait pas le sentiment d’une énième figure d’ « Elu » à qui tout va réussir.

Mention spéciale aussi aux personnages féminins, qui ne sont pas en reste, et c’est agréable. Le personnage de Renn, particulièrement débrouillard, m’a plusieurs fois rappelé Hermione qui sert souvent de bouée de secours à Harry. Saeunn, la mage du clan des Corbeaux est également particulièrement appréciable.

En somme, autant de qualités qui font de ce livre jeunesse un texte pas simplet pour un sou. Je ne garde aucun souvenir de ma première lecture, j’ai donc redécouvert l’aventure avec le plaisir d’un oeil presque neuf.

A lire si vous cherchez :
– une atmosphère sombre et prenante
– un style efficace et fluide
– des personnages qui évoluent et grandissent de manière crédible

Note : 4 sur 5.

>> Vers la chronique du tome 1 <<

Publié dans Fantastique, Fantasy, Nouvelles, Science-fiction

Jardins de poussière, de Ken Liu

De quoi ça parle ?

« Les yeux fermés, j’imagine les photons rebondissant entre les particules de poussière. J’imagine leurs chemins sinueux le long du dédale de surfaces vives, les pièges, les impasses, les culs-de-sac, les chausse-trappes. J’imagine Cigale qui accomplit sa rotation sous les étoiles, modifiant l’angle des rayons du soleil sur les panneaux. J’imagine les couleurs, changeantes, chatoyantes. Une nouvelle façon de voir… »

Le présent recueil regroupe 25 récits de science-fiction, fantasy et fantastique. On y retrouve plusieurs thèmes que Ken Liu aborde régulièrement dans ses textes, parmi lesquels ceux de l’héritage culturel et de sa transmission, des modifications corporelles, de la notion de libre arbitre, d’intelligence artificielle…

Et c’est bien ?

Ce n’est pas le meilleur livre que j’ai lu de Ken Liu. Comme dans tout recueil de nouvelles, il y a forcément du bon et du moins bon. Néanmoins, si je compare à son précédent recueil La ménagerie de papier, celui-ci est clairement en-dessous. Les nouvelles en elles-mêmes ne sont pas mauvaises… disons plutôt qu’elles ne sont pas à la hauteur de ce à quoi Ken Liu m’a habituée. Il faut dire aussi qu’une fois lue sa magistrale novella L’homme qui mit fin à l’histoire (que je ne saurais que trop conseiller à tout lecteur souhaitant découvrir cet auteur), difficile de faire au moins aussi bien.

Pour le recueil qui nous intéresse, je ne vais pas m’attarder à égrener les différentes nouvelles, d’autant plus qu’elles ne m’ont pas spécialement plu. Parmi ces textes vous trouverez de la fantasy, du fantastique, de la science-fiction, dernier thème dans lequel Ken Liu excelle à mes yeux. Beaucoup de textes sont longs et je me suis ennuyée das les trois quarts d’entre eux, regrettant l’étincelle d’excitation que j’avais pu ressentir pour mes précédentes lectures.

Néanmoins, je compte bien aborder deux nouvelles qui sont sorties du lot et que j’ai beaucoup appréciées :

La nouvelle Noeuds, dans laquelle un prospecteur industriel aborde le patriarche d’une peuplade indigène d’une région reculée et isolée de la Chine, dont la particularité est d’écrire avec des noeuds. Il est question dans cette nouvelle de pillage culturel à des fins capitalistes. Je ne vous en dis pas plus avant de ne pas divulgâcher ce que l’auteur a imaginé.

La seconde nouvelle est Jours fantômes, dans laquelle une humanité coincée au fin fond de l’univers tente de sauvegarder des bribes de souvenirs terrestres, d’une vie depuis très longtemps derrière eux, en termes de temps comme de distance. On retrouve ici des thèmes déjà abordés avec brio par Ken Liu, ceux de l’héritage culturel et du sens que l’on veut – ou qu’on n’arrive plus à – leur donner. Sûrement du fait de son histoire, ces thèmes sont marquants chez lui, toujours abordés avec une grande justesse et une humanité qui m’a souvent touchée.

En somme, un recueil très inégal dans lequel peu de textes se démarquent. Je ne saurais trop dire si ma déception vient du fait que l’ensemble est moyen, ou si elle vient de ce que j’ai lu d’autres textes bien meilleur de l’auteur. Toujours est-il que ce n’est certes pas son meilleur ouvrage.

Note : 3 sur 5.
Publié dans Fantasy

Le Prieuré de l’Oranger, de Samantha Shannon

De quoi ça parle ?

Un monde divisé. Un reinaume sans héritière. Un ancien ennemi s’éveille. La maison Berethnet règne sur l’Inys depuis près de mille ans. La reine Sabran IX qui rechigne à se marier doit absolument donner naissance à une héritière pour protéger son reinaume de la destruction, mais des assassins se rapprochent d’elle… Ead Duryan est une marginale à la cour. Servante de la reine en apparence, elle appartient à une société secrète de mages. Sa mission est de protéger Sabran à tout prix, même si l’usage d’une magie interdite s’impose pour cela. De l’autre côté de l’Abysse, Tané s’est entraînée toute sa vie pour devenir une dragonnière et chevaucher les plus impressionnantes créatures que le monde ait connues. Elle va cependant devoir faire un choix qui pourrait bouleverser son existence. Pendant que l’Est et l’Ouest continuent de se diviser un peu plus chaque jour, les sombres forces du chaos s’éveillent d’un long sommeil…
Bientôt, l’humanité devra s’unir si elle veut survivre à la plus grande des menaces.

Et c’est bien ?

Vaste question ! Lecture en demi teinte, plusieurs éléments qui m’ont dérangée, mais un univers pas inintéressant. En près de 1000 pages, il y a forcément du bon et du mauvais qui se glissent.

Un univers construit

Une fois bien entamé le livre, on ne peut que commencer par constater que l’univers est relativement bien construit. On découvrira plusieurs religions fondés sur une culture et un passé plutôt riches. L’autrice semble avoir pris plaisir à les développer et vient agrémenter son récit de contes et légendes qui ont émaillé l’histoire des peuples que l’on rencontre, inspirés de vrais contes et légendes. Les deux parties du mondes antagonistes ont chacune leur monde bien distinct, leur hiérarchie et on sent clairement les inspirations orientales – occidentales évoquées. J’ai aimé découvrir ces aspects, et sur un ouvrage aussi gros, cela a été suffisamment bien développé pour que j’aime y retourner, et que je ferme la dernière page avec quelques regrets.

Le principe des dragons est intéressant, d’autant que l’autrice ne s’est pas inspirée uniquement des dragons cracheurs de feu mais également des dragons asiatiques, davantage en lien avec l’eau et les cieux. Proposer quelque chose de différent sur cette classique figure de la fantasy apporte un vent de fraîcheur et lui a permis de développer un panel de personnages écailleux plutôt intéressant.

Des personnages sympathiques mais un peu fades

Côté personnages en revanche, j’ai eu un peu plus de mal. J’ai beaucoup aimé le personnage de Tané, malheureusement un peu laissé de côté. J’ai eu du mal à apprécier Ead au départ, mais le personnage se développant, j’ai réussi à lui trouver quelque sympathie. Le personnage de Niclays, alchimiste déchu, m’a laissée perplexe : que fait-il là, pourquoi nous présenter son point de vue, sa personnalité m’a parue très bizarre. Pour les autres… je ne peux pas dire que je me sois particulièrement attachée.

Plutôt que de continuer mon énumération, autant en venir au fait : les personnages sont agréables… mais font un peu coquille vide. Aucun ne sort vraiment du lot et, si je me suis attachée à certains, côté psychologie et développement, il manque quelque chose. La plupart son beaux et gentils, les méchants sont moches et méchants, ou alors ils le sont à l’insu de leur plein gré. Cela manque de nuance et de couleur.

Clichés, incohérences et… problèmes de traduction ?

En dehors de l’univers fort agréable, à un moment on sent que les clichés commencent à pointer le bout de leur nez : les prophéties, les artefacts, la grande menace d’un autre temps, les élu.e.s, les histoires d’amours téléphonées… J’aime bien dire que parfois, écrire un bon texte de fantasy, c’est savoir accommoder des clichés de manière à ce que l’on ne les voie pas. Ici c’est raté, les ficelles sont grosses, et nombre de résolutions de plusieurs fils narratifs sont cousus de fil blanc. Mais bon, j’ai fini par en prendre mon parti.

Deux autres ombres au tableau : des maladresses. La prophétie des Beretneth – la lignée de la reine d’Ynis – et la façon dont la religion des six Vertus a été fondée m’a paru bateau et peu crédible en regard du monde de femmes dressé par l’autrice. J’ai aussi eu des problèmes de carte, certains voyages incroyablement courts, même « aidés » par une tempête. La même saison à des endroits du monde totalement éloignés m’a chiffonnée.

Et plus gênant : j’ai souvent butté dans ma lecture en raison de choix de traduction qui m’ont laissée perplexe : des mots rares dans un paragraphe de langage courant, mots rares parfois sujets à répétition – quand l’un deux apparaît 4 à 5 fois en deux pages, on ne voit que ça – , d’autres choix de vocabulaire assez surprenants dans la bouche de personnages censés parler très mal, des phrases très bizarrement agencées syntaxiquement qui conduisent à des erreurs d’accords de verbe, sans oublier pas mal de coquilles (« Margret » transformée en « Magret » m’a rendu un passage fort comique). Je ne sais pas si c’est dû au fait qu’il y ait, si j’en crois la page de garde, deux traducteurs. Toujours est-il que ce souci m’a plusieurs fois empêchée d’entrer correctement dans la lecture.

Un avis en demi-teinte

Une lecture dont je suis donc ressortie mitigée. On m’a vendu du rêve en me parlant d’un récit de fantasy extraordinaire, qui changeait, qui sortait du lot. Même digne de Tolkien ou Martin, selon la quatrième de couverture. Mon ressenti tient en trois mots : faut pas déconner. C’est une très bonne aventure, avec des personnages que j’ai bien aimé suivre, de bonnes idées, un univers avec quelques failles mais intéressant à découvrir. Néanmoins, autant par le style que par ce qui y est développé, ce n’est pas l’aventure fantasy incontournable. Je vois également très bien quels éléments poussent à parler de Martin ou Tolkien (des morts et un gros vilain de feu craché par sa montagne), mais on reste quand même très loin de ces sagas en termes de densité. En ce qui me concerne, ça reste une fresque très agréable, que je conseillerais plutôt à des personnes découvrant le genre et ne craignant pas les pavés, ou à des personnes ayant envie de lire un livre de fantasy « classique ».

A lire si vous cherchez :
– un univers immersif
– à découvrir le genre fantasy
– un peu plus de femmes dans le florilège de personnages proposés

Note : 3 sur 5.
Publié dans Fantasy

Un long voyage, de Claire Duvivier

De quoi ça parle ?

Issu d’une famille de pêcheurs, Liesse doit quitter son village natal à la mort de son père. Fruste mais malin, il parvient à faire son chemin dans le comptoir commercial où il a été placé. Au point d’être pris comme secrétaire par Malvine Zélina de Félarasie, ambassadrice impériale dans l’Archipel, aristocrate promise aux plus grandes destinées politiques. Dans le sillage de la jeune femme, Liesse va s’embarquer pour un grand voyage loin de ses îles et devenir, au fil des ans, le témoin privilégié de la fin d’un Empire.

Et c’est bien ?

Je crois que je peux même le classer dans mes coups de coeur 2020. Un long voyage, c’est un roman court, mais intense et riche. Le premier élément qui m’a marqué, et sûrement celui qui a grandement contribué à me rendre le livre aussi addictif, est de mannière incontestable la plume de Claire Duvivier. Je l’ai trouvée très belle, et la forme que prend le récit, celle d’un carnet de voyage avec un style qui m’a rappelé les styles du 19e siècle, est particulièrement réussie et lui donne sa force.

A travers les yeux du narrateur, Liesse, le lecteur découvre un Empire sur le déclin, en difficulté face à ses territoires lointains. Entre la vie de Liesse, sa vie sur l’Archipel puis sur le continent, et ce qu’il découvre de la politique, de l’économie, des gens qui l’entourent, pas le temps de s’ennuyer. La figure centrale du récit, celle de Malvine Zélina de Félarasie, dont Liesse entreprend de nous narrer l’histoire pour le bénéfice d’une certaine Gémétous, se dessine petit-à-petit. L’autrice sait ménager ses effets et dévoiler peu à peu cette femme extraordinaire. Les personnages qui gravitent autour d’elle et autour de Liesse ne sont pas en reste, et ce sont de multiples portraits humains qui viennent se superposer à l’histoire. Jusqu’à l’événement qui fera basculer l’histoire – et l’Histoire. Là encore, difficile de lâcher l’ouvrage devant les révélations qui sont faites.

A travers le témoignage de Liesse se dessinent aussi différents thèmes. Celui de l’intégration lorsqu’il prend conscience qu’il n’est qu’une pièce autochtone rapportée, intégrée à la grande machine du fonctionnariat d’Empire. Celui de la cohabitation des peuples et de la notion de territoire et d’héritage. Thèmes que j’ai assez peu croisés en fantasy et qui sont ici traités avec une grande finesse.

Enfin, Un long voyage, c’est aussi pour moi un des exemples qu’un livre de fantasy n’a pas nécessairement besoin de dix tomes de 500 pages chacun pour dresser un univers riche et consistant. Je souhaite en tout cas de tout coeur que l’autrice continue à écrire, car je suis suivrai ses écrits avec grand plaisir.

A lire si vous recherchez :
– un livre de fantasy court mais dense
– une histoire humaine avant une histoire de magie
– un style qui sort du lot

Note : 5 sur 5.