Publié dans Fantasy, PLIB 2023, Policier, Science-fiction

Metalya entre les mondes – Patrick Moran #PLIB2023

De quoi ça parle ?

Metalya est l’une des nombreuses pacificatrices de la cité de Tal Emmerak. Son boulot, c’est des enquêtes, si possibles pas trop compliquées et bien payées, ce qui, dans un cas comme dans l’autre, n’arrive pas souvent.

Lorsqu’un riche client la contacte pour lui demander d’enquêter sur la mort de sa femme, Metalya accepte à reculons, appâtée par l’argent. La pacificatrice découvre rapidement que cette femme était une scientifique de renom qui travaillait pour l’Institut Voqer-naag, dans un département spécialisé dans ces nouvelles sciences autrefois appelées « magie ». Bien vite, tout semble se liguer contre Metalya. Armée de quelques éclats – ces petits objets capables d’influer sur la réalité – et de son livre fétiche, elle va braver tous les obstacles que l’on va mettre sur son chemin et découvrir la vérité entre les mondes.

Et c’est bien ?

Un texte sympathique mais qui ne restera pas parmi mes lectures mémorables. Si cette aventure n’est pas dénuée de qualité, un manque de rythme et la narration particulière ne m’ont pas permis une immersion satisfaisante.

L’auteur met en scène une cité tentaculaire, prise en sandwich géopolitique par deux états voisins. On y découvre des paysages idylliques dignes de cités balnéaires de carte postale : plages, touristes, couchers de soleil et odeurs de churros sont au rendez-vous. On sent très vite la volonté de l’auteur de proposer une aventure enlevée et pêchue à travers un ton de narration sarcastique. A priori des ingrédients qui me plaisent.

Pour autant, j’ai eu du mal à entrer dans l’histoire. J’ai trouvé la première moitié du récit assez froide. L’histoire prend rapidement l’allure d’une enquête policière assez classique. Malgré le fait que le récit nous soit servi à travers le franc-parler de Metalya, le rythme est assez mou. On coche un parcours d’investigation lambda et sans surprise, dans son déroulé comme dans les protagonistes rencontrés. Plus gênant encore à mes yeux : Metalya se met à faire ses hypothèses et à mouliner les éléments de l’enquête à la place du lecteur. On suit son cheminement intérieur et j’ai trouvé désagréable qu’elle fasse ce travail à ma place, là où j’aurais aimé que l’auteur nous donne davantage à manger sur ses personnages ou la cité de Tal Emmerak.

Par ailleurs, c’est une réflexion que je me suis faite en lisant cet ouvrage : j’ai de plus en plus de mal avec les enquêtes en SFFF si ces deux éléments ne se révèlent pas utiles à l’histoire. Les ficelles des histoires policières je les connais par coeur, et si, comme pour la SF, elles ne m’apportent pas d’éléments intéressants de réflexion sur notre société ou la psyché humaine, je ne vois pas d’intérêt autre que le divertissement. Alors certes, je lis pour me divertir, mais j’aime avoir – même juste un peu – de la consistance. Ici, l’auteur apporte du grain à moudre, et je retiens particulièrement une page que j’ai trouvée brillante sur la justice et la notion de réparation. Le problème, c’est que c’est anecdotique et que j’aurais aimé que ces moments de brève réflexion émaillent davantage le texte. Le background est travaillé mais on reste trop en surface à mon goût, sur la géopolitique de Tal Emmerak, sur les services (non) publics par exemple.

Il en va de même pour les découvertes de Metalya. Difficile de faire des révélations qui détonnent quand les schémas mis en scène ne sont pas neufs, et en – fut un temps – fan de Fringe, au final j’ai eu une impression de soufflé qui retombe. Tout du long, en raison de ce rythme et thèmes balbutiants, j’ai vraiment une impression de premier roman – bien que l’auteur ait pourtant écrit d’autres textes précédemment.

Pour autant, l’univers a du potentiel et serait intéressant à développer, et éventuellement retrouver Metalya dans d’autres aventures pourrait être plaisant. J’ai particulièrement aimé un personnage : Monsieur Octopus, on sent dès les premières lignes qu’il a le potentiel d’une mascotte. La lecture, bien qu’en dents de scie, ne m’a pas été désagréable. Je suis simplement un peu déçue qu’elle soit bien des les clous des schémas que le texte adopte, il m’a clairement manqué une petite étincelle de quelque chose.

Note : 2.5 sur 5.

#PLIB2023
#PLIB2023A
#ISBN9782354089887

Publié dans Coups de coeur, PLIB 2023, Science-fiction

Lazaret 44 – Julien Heylbroeck #PLIB2023

De quoi ça parle ?

Sur une planète lointaine et hostile s’est écrasée une créature titanesque.

Dans cette carcasse putréfiée, l’humanité a érigé Karkasstad, une cité industrielle où, au péril de leur vie, les ouvriers arrachent à la dépouille les substances organiques nécessaires à l’Alchimie dont les formules savantes ont supplanté la science.

Au centre de cette métropole moribonde, entre les fumerolles méphitiques et les grondements prolétaires, Knaagdier, à la fois détective et médecin de la peste, enquête sur une étrange maladie qui ronge la chair des habitants de cette cité-tombeau.

Et c’est bien ?

Sacré ovni littéraire que Lazaret 44. Je le confesse, le pitch un peu crassou m’a carrément bottée, et c’est avec une joie de gamine que j’ai plongé dans les tripes de la cité faisandée.

Premier point très positif : l’auteur parvient rapidement à exposer un univers riche et complexe sans s’étaler sur les trois quarts de son livre. Les romans « encyclopédiques » sur leur univers me sortent par les yeux, et Lazaret se tire à merveille de cet écueil, malgré pas moins de six points de vue différents. Il faut certes le temps de se mettre dans le bain – et passer outre, c’est là sûrement le seul reproche que je fais au texte et je souhaite de tout coeur que cela ne lui porte pas préjudice, les très nombreuses coquilles – , mais une fois que l’on a intégré qui est qui, c’est avec plaisir et même une certaine impatience que j’attendais de découvrir le chapitre suivant dédié à chacun.

L’univers a été jubilatoire à découvrir – l’auteur imagine une cité humaine bâtie au fil des siècles pour l’exploitation des matières premières offertes par la carcasse. C’est un véritable écosystème que l’auteur déploie, dont les humains font partie intégrante au même titre que les charognards et insectes qui grouillent dans les entrailles de la dépouille. C’est cet environnement atypique en plus de l’idée de suivre un médecin chargé de trouver remède à une peste locale qui m’a attirée – et plu. Au-delà de la cité, on entraperçoit ce qu’est devenue l’humanité, les cultes et la politique qui se sont développés. L’auteur ne détaille pas tout mais donne suffisamment à manger sur ces sujets pour que l’on ne soit pas frustré.

Chacun des points de vue met en scène des personnages d’horizons variés – une ouvrière, un malade de la fameuse peste, des politiques, un médecin, une navigatrice… Les thèmes qui émaillent le récit sont brillamment mis en scène et j’ai apprécié la manière dont l’auteur les traite. Conditions de travail, grèves, luttes sociales, partage des richesses, traitement des laissés pour compte… les sujets-miroirs à notre propre société ne manquent pas.

De par son contexte, le texte offre une ambiance assez glauque. On n’est pas franchement dans de l’horreur (et ce n’est pas le but), mais on demeure dans le peu ragoûtant, j’ai eu la sensation, pour mon plus grand plaisir, d’un texte dans l’esprit « série B ». On sent également que l’auteur est rôliste, certaines manières d’introduire des éléments m’ont tout de suite fait tilt. C’est généralement quelque chose qui me rend réticente car j’apprécie généralement peu la façon dont l’univers est posé, néanmoins je trouve que Julien Heylbroeck a su mettre en scène l’environnement de ses personnages de manière fine et passionnante, sans avoir l’impression d’en déceler toutes les ficelles narratives.

Jusqu’au bout j’ai suivi les péripéties de chacun des protagonistes, avec même une certaine frénésie dans le dernier tiers. Lazaret 44 offre un univers atypique, des personnages attachants et des thèmes de fond intelligents… tout pour que ce soit un coup de coeur, et souhaiter pouvoir replonger dans cet univers si l’auteur nous y invite à nouveau.

Note : 5 sur 5.

#PLIB2023
#PLIB2023A
#ISBN9782361837808

Publié dans Non classé

Le château de Hurle – Diana Wynne Jones

De quoi ça parle ?

Au cœur de la contrée magique d’Ingarie, dans le charmant village de Marché-aux-Copeaux, Sophie s’ennuie. Seule dans sa chapellerie, elle a accepté son destin d’aînée de la famille, et de vivre dans l’ombre de ses sœurs, résignée ainsi à un avenir routinier. Après tout, tel est l’usage… Lorsqu’un beau jour, la jeune fille a le malheur d’offusquer la sorcière des Steppes, celle-ci lui dérobe 60 ans de sa vie, la laissant vieille et démunie. Cherchant désespérément un moyen de briser le sortilège, la jeune chapelière sera amenée à pactiser avec le démon du feu, Calcifer. Vivant dès lors dans un étrange château ambulant dont les secrets restent entiers, Sophie entame une extraordinaire aventure à la recherche de sa jeunesse volée, prête à reprendre en main son destin.

Et c’est bien ?

C’est un peu circonspecte que j’ai plongé dans le livre qui a inspiré Le château ambulant de Hayao Miyazaki. En général, découvrir une autre version d’une création culturelle que celle que je connais me réussi rarement, et quelques retours mitigés m’ont rendue un peu réticente. Verdict ?

Verdict, c’est très bien. Un des principaux reproches que j’avais pu lire concernait la simplicité du récit, élément qui m’a plutôt plu. Le ton est très jeunesse, l’histoire avance vite et le vocabulaire n’est pas compliqué, néanmoins, la plume de l’autrice joue également beaucoup avec les non-dits et fait pour beaucoup appel à la matière grise du lecteur pour faire ses propres déductions ; c’est toujours quelque chose qui me plaît.

Côté histoire, si bien entendu j’ai retrouvé avec plaisir de nombreux éléments présents dans le film d’animation, ainsi que leur esthétique (même si j’imagine que mon imaginaire avait déjà été formaté par ce biais), il reste suffisamment de zones non-explorées par Miyazaki pour éprouver le plaisir de la découverte. De petits riens qui changent à des pans complets de l’histoire, c’est à la fois en terrain familier et en terre inconnue que j’ai mis les pieds yeux.

On retrouve bien entendu les différents personnages, la place des filles a également une importance dans le texte et un questionnement qui y est lié. L’histoire du personnage de Hurle est néanmoins différente, et par ce que l’on découvre de lui. Si le Hauru du film a un côté charmeur, le Hurle du texte est un personnage enjoué mais également assez désagréable, que le lecteur met du temps à apprécier.

Certains passages sont très drôles, l’humour émaille les paragraphes, la répartie de certains personnages est particulièrement savoureuse et plusieurs situations ubuesques colorent l’aventure tout du long. Une très bonne lecture, rafraîchissante, facile d’accès et intéressante, on a ici un très bon roman jeunesse.

Note : 4 sur 5.
Publié dans Fantastique, Fantasy, Historique

Trilogie d’une nuit d’hiver, tome 1 : L’ours et le rossignol – Katherine Arden

De quoi ça parle ?

Au plus froid de l’hiver, Vassia adore par-dessus tout écouter, avec ses frères et sa sœur, les contes de Dounia, la vieille servante. Et plus particulièrement celui de Gel, ou Morozko, le démon aux yeux bleus, le roi de l’hiver. Mais, pour Vassia, ces histoires sont bien plus que cela. En effet, elle est la seule de la fratrie à voir les esprits protecteurs de la maison, à entendre l’appel insistant des sombres forces nichées au plus profond de la forêt. Ce qui n’est pas du goût de la nouvelle femme de son père, dévote acharnée, bien décidée à éradiquer de son foyer les superstitions ancestrales.

Et c’est bien ?

Un ouvrage dans lequel j’ai eu bien du mal à me couler, mais que je ne regrette pas de m’être acharnée à lire, il fait partie de mes meilleures lectures de l’année pour l’instant.

L’entrée dans le texte m’a été plutôt laborieuse. La mise en place prend son temps ; le lecteur est plongé dans le quotidien d’une famille de seigneur terrien de la Rus’ médiévale. On y découvre leurs liens avec le pouvoir, l’enfance de Vassilissa, la plus jeune fille, qui semble avoir hérité d’étranges pouvoirs maternels, ainsi que les différentes créatures qui peuplent leurs environs. La touche surnaturelle est particulièrement ténue et l’application avec laquelle l’autrice pose son décor m’a parue un peu longue malgré les qualités multiples de ces détails.

Katerine Arden connaît manifestement très bien l’histoire et le folklore slaves et il m’a été d’un réel plaisir de découvrir la Russie du 14e siècle, son paysage géopolitique, et surtout, ce qui va faire point de tension dans le texte, toutes les ficelles liées à la religion et à la culture païenne. C’est d’ailleurs cet élément, et la bascule qui s’opère vers le milieu du texte, qui a raccroché mon intérêt pour cette lecture. L’autrice se sert à merveille des ficelles qui opposent le christianisme au folklore, à travers l’arrivée d’un prêtre dans la famille de Vassilissa – Vassilissa qui semble capable de voir les multiples petits démons qui habitent et nourrissent son environnement.

Outre le fait que la prose de Katerine Arden se tient très bien et se lit avec plaisir, le mélange de contes et d’éléments banals qui progressivement trouvent un point d’orgue dans cette lutte spirituelle devient vite passionnant. Lutte qui opposent une religion coupée de son environnement, de la nature des hommes et des bêtes, à des croyances ancrées dans un réel que l’on ne comprend pas toujours, mais avec lequel l’homme vit en harmonie en en acceptant autant le positif que le négatif.

Le dernier tiers verse complètement dans la fantasy option contes et onirisme et relie les fils que l’autrice a tissés avec patience depuis le début, pour finir en apothéose qui m’a convaincue définitivement de plonger sous peu dans les tomes suivants. Un récit de très bonne facture, qui vaut la peine de s’accrocher pour l’apprécier.

Note : 4.5 sur 5.
Publié dans Fantasy, PLIB 2023, Post-apocalyptique, Young Adult

L’épée, la famine et la peste, tome 1 – Aurélie Wellenstein #PLIB2023

De quoi ça parle ?

Depuis un demi-siècle, le royaume de Comhghall s’enfonce dans un âge sombre : les monstres pullulent, des villages entiers disparaissent dans les toiles d’araignées, et les tarentas tissent dans l’esprit des hommes, les condamnant à s’étioler dans la mélancolie et les idées noires.

Trois êtres brisés deviennent la cible d’une population aux abois.

Un garçon possédé par l’esprit d’un loup, une jeune fille soupçonnée d’avoir les pouvoirs d’une araignée, un ancien soldat qui a tout perdu, persuadé que son fils vit dans l’œil d’un cerf…
Pourchassés par le chef de l’Inquisition et son archère, ils vont devoir s’allier pour survivre. Mais sont-ils des bouc-émissaires ou, au contraire, trois redoutables fléaux qui porteront le coup de grâce à ce monde agonisant ?

Et c’est bien ?

Après l’échec des Loups chantants j’ai voulu tenter un ouvrage plus récent, le dernier sorti de l’autrice.

Si j’ai trouvé qu’il avait de bonnes idées – le loup-garou renouvelé de manière intéressante, le thème des araignées, peu vu et que je trouvais très bienvenu, les ruines / monde pourrissant -, je ne suis toujours pas convaincue par la façon dont l’autrice les met en scène.

Le récit comporte pas mal de clichés et de scènes vues et revues, des schémas assez grossiers et un style plat. On est encore dans une binarité assez marquée avec des méchants très méchants et des gentils très gentils. Le personnage de la fille forte est assez caricatural. Le vilain inquisiteur sanguinaire aussi. L’inquisiteur repenti également. Un garçon bègue peu sûr de lui.

Les thèmes animaux / nature de l’autrice me parlent, dans ce livre aussi, et je crois que je partage pas mal de ses visions sur la nature, les animaux, la place de l’être humain dans tout ça. Cependant, côté mise en oeuvre, je reste très sceptique là aussi parce que ces thématiques sont évoquées très en surface, de manière facile. Le thème des araignées, animaux peu aimés, aurait pu donner quelque chose d’intéressant et j’ai trouvé qu’on tombait dans la facilité.

Les autres thèmes (amitié, famille et tout le tremblement), dans leur nature ou leur traitement m’ont davantage paru appartenir au jeunesse / young adult qu’à des bouquins adultes, j’ai trouvé que ça manquait de maturité et de profondeur. Et comme en plus, je n’aime globalement pas le young adult, me retrouver avec ce texte dans les mains n’a pas été une bonne surprise. Le style est fluide mais fade et peu diversifié en termes de vocabulaire, ce qui m’a plusieurs fois donné l’impression de relire les mêmes phrases – sans compter que je suis tombée sur un paragraphe, hormis les prénoms, copié / collé des Loups chantants au mot près (je ne sais pas si c’est voulu ou non, dans tous les cas je trouve cela soit maladroit, soit malvenu).

Je lirai néanmoins le tome 2 histoire de voir où tout cela mène. La fin m’a un peu raccrochée mais il y a trop de points moyens ou négatifs pour en faire une lecture positive.

Note : 1.5 sur 5.

#ISBN9782381671321
#PLIB2023A
#PLIB2023