Publié dans Fantasy, Young Adult

Nevernight, tome 1 – Jay Kristoff

De quoi ça parle ?

Dans un pays où trois soleils ne se couchent presque jamais, une tueuse débutante rejoint une école d’assassins, cherchant à se venger des forces qui ont détruit sa famille.

Fille d’un traître dont la rébellion a échoué, Mia Corvere parvient de justesse à échapper à l’anéantissement des siens. Livrée à elle-même et sans amis, elle erre dans une ville construite sur les ossements d’un dieu mort, recherchée par le Sénat et les anciens camarades de son père.

Elle possède un don pour parler avec les ténèbres et celui-ci va la mener tout droit vers un tueur à la retraite et un futur qu’elle n’a jamais imaginé.

Et c’est bien ?

Bien que pas trop fan de De Saxus et leur catalogue, comme d’habitude, la curiosité est là quand je lis plein de retours positifs sur un ouvrage. J’ai parfois eu de bonnes surprises, donc généralement, j’y mets un pied histoire de voir.

Autant le dire tout de suite : mon entrée dans cette lecture a été assez compliquée. Je ne vais pas vous dire que c’est un livre que j’ai apprécié, parce que j’ai trouvé le style vraiment pas bon du tout, mais c’est une expérience-lecture qui ne se termine – bizarrement – pas trop mal.

Le premier tiers du bouquin a été une vraie purge. J’ai par moment eu l’impression qu’aucun travail éditorial n’a été fait. C’est lourd, l’agencement des phrases et les tentatives de métaphores de l’auteur sont vraiment en-dessous de tout. Les notes de bas de page alourdissent l’ensemble, et surtout, surtout, on a un humour « pipi-caca-zizi » de collégien graveleux, dont certaines piques vraiment sexistes sous couvert de sarcasme (et désolée, mais autant l’humour noir je donne à fond dedans tous les jours, autant là une ou deux fois, j’ai trouvé ça vraiment déplacé – cf le passage sur les caniveaux et les nanas, j’ai trouvé ça plus que très très limite). Sans parler du prologue que j’ai trouvé franchement cringe.

Je ne sais pas vraiment si l’auteur s’est calmé en cours de route ou si c’est parce que j’ai arrêté de lire les notes de bas de pages (à base de zizi-fesse souvent les quelques fois où j’y ai picoré des phrases), peut-être les deux. Toujours est-il que, crispée à l’idée de lire un bouquin mâtiné de blagues pseudo-humour sur les nanas, il n’en a rien été, et l’héroïne est plutôt pas trop mal développée (la raison pour laquelle je mets les blagues du début sur le compte de la maladresse). Elle évolue, et bien que le détail des quelques scènes de fesses m’ait paru inutile, pour ne pas dire un rien racoleur, ils ne font partie de son évolution, et j’ai trouvé l’auteur pas trop mauvais sur la construction d’un personnage féminin (en dehors du prologue cringe situé plus haut).

Les personnages sont plutôt attachants, bien qu’on soit dans de gros clichés bien classiques : une héroïne darkounette trop forte, des antagonistes méchants parce qu’ils sont méchants, des professeurs qui font aussi dans le cliché complet, un namoureux avec un passé traumatique, la vilaine rivale trop belle et cinglante et son acolyte balourd… Bref, ce n’est clairement pas un bouquin qui brille par son originalité. Les inventions propres à l’univers m’ont parues un peu inutilement originales/spectaculaires, voire j’ai un gros doute sur la cohérence de l’histoire de vrai-nuit / non-nuit. Je n’ai pas toujours adhéré à tout ce que l’auteur met en scène et j’avoue que les trucs darkinou badass ne sont plus trop mon trip (oui, je suis habillée tout en noir et je me vautre dans ton sang, mouahaha) (ouais je sais je suis fan de Gideon ; c’est darkinou badass) (mais Gideon c’est bien écrit) (oui j’arrête les parenthèse).

Alors, sur 800 pages, on pourra se demander pourquoi je n’ai pas refermé le bouquins avec tout le bagage ci-dessus… malgré tous les clichés et le style bien lourdingue, bizarrement, il y a un moment où ça devient addictif. Les mécanismes de la schoolfic / dark academia marchent bien, et l’envie de voir l’évolution de l’héroïne et la façon dont elle va se sortir des embûches croisées m’a malgré tout tenue en haleine. Et puis, il y a un bibliothécaire assez sympatoche, alors je suis restée un peu, pour voir. Les révélations finales ne brillent pas non plus par leur originalité mais font le job et apportent plutôt satisfaction dans la résolution des différents fils lancés par l’auteur.

Pour conclure, je dirais que j’ai aimé cette lecture de la même manière que j’aime les frites : ce n’est pas toujours très bon ou très sain et tu connais le plat par coeur, mais il y a un côté addictif qui fait que tu reviens. Et pour le coup tant mieux, parce que j’avais déjà acheté le 2 et que vu mes débuts de lecture, je commençais à me dire que j’avais fait une bêtise. On verra si la suite est moins vacillante.

Note : 2.5 sur 5.
Publié dans Science-fiction

La société protectrice des kaijus – John Scalzi

De quoi ça parle ?

Ils sont GROS
Ils sont MÉCHANTS
Ils sont MENACÉS D’EXTINCTION

Jamie accepte immédiatement le job que Tom, une ancienne connaissance, lui offre. Travailler pour une société protectrice d’animaux plutôt que livrer des repas est une veine.
Seul problème, les animaux concernés sont des kaijus.
Or, si ces monstres sont les êtres les plus gros et les plus dangereux de cet univers, ils ont besoin d’aide pour survivre, car des entreprises peu scrupuleuses voudraient les exploiter.
Tous ceux qui ont vu Jurassic Park savent que c’est une mauvaise idée…

Et c’est bien ?

Ouaip, comme ça, à la lecture de la 4e de couverture, ça fait film blockbuster. C’est un peu – non, carrément, même – le cas. Et c’est ce que j’aime chez Scalzi. Des bouquins façon grosse prod. Du dialogue un peu lourdingue mais fun ? Y en a plein. Des rebondissements de barjos ? Y en a aussi. Du lattage de société capitaliste américaine ? Bon ok ça c’est pas grosse prod mais plutôt Scalzi, et il ne déroge pas à la règle en mode gros troll à l’intention des réacs.

L’ambiance de lecture est très chill, on est embarqué dans une aventure à la Jurassic Parc, accrochés aux basques des kaijus. C’est barré, c’est joyeusement farfelu et difficilement lâchable une fois qu’on y a mis le nez. J’ai eu un peu de mal à rentrer dans l’ouvrage à cause de la sur-représentation des dialogues en mode « envoi de fions », que j’ai trouvé dans un premier temps assez fatigant. Et puis, le lâcher-prise aidant, on finit par se couler dans l’histoire et ça en devient presque addictif.

L’aventure est bourrée de clins d’oeil à la culture pop, et rien que pour les noms donnés aux kaijus, ça vaut le détour. On s’attache à absolument tous les personnages, dotés d’un bon capital sympathie, même si je crois que j’ai eu quand même un énorme faible pour Martin Satie, le pilote d’hélico.

La découverte du monde des kaijus et de leurs caractéristiques est assez rigolote. L’auteur nous balance des données à peu près plausible, même si ça paraît complètement pété – mentions spéciale aux réacteurs nucléaires – mais vu le côté délirant du bouquin, je me suis prêtée au jeu sans problème ; jusqu’à la fin, digne elle aussi des gros films à licence.

Bref, si vous cherchez un truc fun, intelligent et qui ne demande pour autant pas beaucoup de cerveau disponible, foncez ! Après une lecture bien dense (cf ma chro précédente), celle-ci m’a offert une bulle de décompression pile dans le ton.

Note : 4 sur 5.
Publié dans Science-fiction

Le goût de l’immortalité – Catherine Dufour

De quoi ça parle ?

Mandchourie, en l’an 2213 : la ville de Ha Rebin dresse des tours de huit kilomètres de haut dans un ciel jaune de pollution. Dans les caves grouille la multitude des damnés de la société, les suburbains. Une maladie qu’on croyait éradiquée réapparaît. Cmatic est chargé par une transnationale d’enquêter sur trois cas. Une adolescente étrange le conduira à travers l’enfer d’un monde déliquescent, vers ce qui pourrait être un rêve d’immortalité. Mais vaut-il la peine d’être immortel sur une Terre en perdition ?

Et c’est bien ?

Vingt ans après ma première lecture, l’envie de replonger dans cet ouvrage, dont je gardais un excellent souvenir, m’a prise. L’occasion de me relancer dans l’aventure s’est présentée avec une amie qui voulait découvrir l’ouvrage. Comme la première fois, j’ai un peu ramé sur le premier chapitre, mais mieux engrangé les informations. Malgré les bribes qui me restaient de la première lecture, celles-ci m’ont quand même pas mal aidé à entrer dans un texte dense et qui se mérite, mais qui mérite quand même le détour.

Le goût de l’immortalité, c’est d’abord, pour moi, la plume de Catherine Dufour. C’est maîtrisé, c’est beau, et c’est très souvent acerbe et cynique. Les mots tombent et ça tranche dans le vif, sans concession. Tout le monde en prend pour son grade – le capitalisme, l’Occidental moyen, l’industrie pharmaceutique, les politiques, les médias… Et à chaque fois avec une justesse du verbe particulièrement jubilatoire.

L’univers dépeint est sombre. Une première partie, qui fait quasiment huis-clos, se concentre sur l’héroïne et son histoire, on découvre un monde replié sur lui-même, où chacun surnage comme il peut, technologies et fractures sociales à l’appui. Une seconde partie nous emmène dans les tréfonds de la suburb, sous-sol aménagé où les laissés pour compte se sont réfugiés pour échapper à la maladie et à la pollution. Les deux parties sont complètement différentes, d’atmosphère comme de narration, et pourtant chacune est étroitement imbriquée.

L’autrice nous balade, c’est le cas de le dire. Dans ce texte qui prend la forme d’une longue lettre, les circonvolutions sont nombreuses. On sent des secrets et des mystères, on tourne autour et on nous fait mariner – avec art – avant de lâcher le morceau. L’intrigue paraît aussi s’éparpiller : que vient-on faire en Polynésie ? Et dans la suburb ? Et pourquoi nous parle-t-on de vaudou ? Quel rapport avec notre gamine malade du début ? La patience est le maître mot de cette lecture et les réponses viennent comme des récompenses.

Enquête, thriller, roman d’anticipation, post-apocalyptique, dystopie… dans cette histoire protéiforme, j’ai eu à nouveau grand plaisir à savourer l’écriture comme les différentes découvertes. La conclusion tombe comme un couperet, et renvoie tout le monde dos-à-dos sur fond de rouages sociétaux rouillés et dysfonctionnant plein tube. Mis à part de tout petits bémols (un passage confus), une replongée dans un roman qui reste parmi les meilleurs que j’ai lus, et sûrement mon préféré de l’autrice.

Note : 5 sur 5.
Publié dans Science-fiction

Un psaume pour les recyclés sauvages – Becky Chambers

De quoi ça parle ?

Voilà des siècles, les robots de Panga ont accédé à la conscience et lâché leurs outils ; voilà des siècles, ils sont partis ensemble dans la forêt, et nul ne les a jamais revus ; voilà des siècles qu’ils se sont fondus dans les mythes de l’humanité.
Un jour, la vie de Dex, moine de thé, est bouleversée par l’arrivée d’un robot qui, fidèle à une très vieille promesse, vient prendre des nouvelles. Il a une question à poser, et ne rejoindra les siens qu’une fois satisfait de la réponse. La question : « De quoi les gens ont-ils besoin ? ». Mais la réponse dépend de la personne à qui on parle et de comment on pose la question.

Et c’est bien ?

Si ce nouvel ouvrage de Becky Chambers entre droit dans la lignée des autres que j’ai pu lire, par ses thématiques mais aussi par leur traitement, c’est aussi sûrement celui qui, jusqu’ici, m’a le moins convaincue.

La lecture n’est pas désagréable, comme d’habitude, c’est très cozy-doudou. Le point de départ est plutôt alléchant : Dex, moine de son état, vit dans une utopie… une utopie qui semble lui peser sans qu’il parvienne à trouver pourquoi. A partir de là, le potentiel devient particulièrement intéressant. Un monde où tout tourne bien, sans grincer, est-il enviable ? Et toute la panoplie de fil à tirer sur le même thème.

Malheureusement, ce n’est pas par là que semble se diriger l’autrice – bon, ça c’est mon affaire et je ne lui reproche pas de ne pas avoir écrit le livre que j’aurais voulu. Néanmoins j’ai trouvé les thématiques assez molles et pas aussi pertinemment traitées que ce à quoi j’avais été habituée. La route en compagnie de Dex est agréable. Sérieusement moi, ouvrir une roulotte à thé, ça me botterait vraiment. Mais là encore, les trucs qui vont trop bien, ça embête Dex, qui file vers la forêt et se retrouve en pleine crise existentielle, en sus affublé d’un robot.

Si l’idée de traiter la place de l’être humain dans la nature est sympathique – car c’est là, finalement, le fond de l’histoire – j’ai trouvé que l’autrice restait très en surface du sujet. Le robot sert de contrepoint à la prise de conscience de Dex, mais il m’a manqué davantage de consistance au milieu de toute cette atmosphère fluffy (réellement agréable attention, mais j’ai le sentiment que ça a un peu étouffé le reste). Et j’avoue que je me suis un peu fait suer entre deux séances de philosophie qui m’a parfois donné l’impression de tomber dans des lieux communs.

C’est donc un mouais bof ; une lecture loin d’être désagréable, mais qui m’a clairement laissée sur ma faim.

Publié dans Fantasy

L’impératrice du sel et de la fortune – Nghi Vo

De quoi ça parle ?

Un mariage politique force In-yo, jeune femme de sang royal, à s’exiler au sud, dans l’empire Anh. Ses frères sont morts, ses armées et leurs mammouths de guerre vaincus de longue date restent reclus derrière leurs frontières.
Seule et humiliée, elle doit choisir ses alliés avec circonspection.
Lapin, une jeune servante vendue au palais par ses parents en réparation de l’absence de cinq paniers de pigments se prend d’amitié pour la nouvelle épouse esseulée de l’empereur et en voit son existence bouleversée.
Chih interroge la domestique au crépuscule de sa vie sur les divers objets peuplant sa maison. Leurs origines forment une histoire que les archives officielles ignorent et qui pourrait déstabiliser l’empire.

Et c’est bien ?

Une lecture un peu par hasard. Parce que l’Atalante en qui j’ai toute confiance pour dénicher de super textes, et puis aussi un peu parce que la couverture ^^ La quatrième de ouverture laissait également présager une histoire de femmes, qui m’attirait bien.

Au final ça a été un petit coup de coeur que ce texte. Chaque chapitre est initié par une description d’objet, factuelle, tenant presque de l’inventaire, et chacun donne lieu à un fragment supplémentaire de l’histoire de l’impératrice In-Yo. J’ai aimé cette place faite aux objets du quotidien, chargés de souvenirs et de l’histoire de leur propriétaire. Il y a une forme de dignité, mais aussi de sacralité dans la manière dont chacun est décrit et sollicité pour évoqué un passé enfui.

J’ai aimé, aussi, cette histoire de femmes, très simple – relativement courte, mais il n’y avait pas besoin de plus. Des femmes prisonnières de leur rang, de leur condition, de leur rôle, mais qui malgré cela trouvent des exutoires. L’impératrice In-Yo est peu présente, mais qui inspire le respect et acquiert une grande présence au travers du récit de Lapin, sa servante.

L’univers direct de Chih, qui recueille ces histoires est très peu décrit, mais les quelques bribes que l’on entrevoit semblent contenir d’alléchantes promesses et un petit goût de Miyazaki (à tout le moins dans la manière dont je me suis imaginé les choses).

Sous le couvert d’un archiviste dont le rôle est d’engranger la mémoire des humains, même secrète, même dérangeante ou interdite, la grande Histoire devient aussi une histoire de personnes et d’humanité. En bref, j’ai autant aimé l’histoire et ses thèmes que l’état d’esprit qui transparaît. Une lecture que je recommande très chaudement.