
De quoi ça parle ?
Rien n’est plus comme avant : le monde tel qu’on le connaît semble avoir vacillé, plus d’électricité ni d’essence, les trains et les avions ne circulent plus. Des rumeurs courent, les gens fuient. Nell et Eva, dix-sept et dix-huit ans, vivent depuis toujours dans leur maison familiale, au cœur de la forêt. Quand la civilisation s’effondre et que leurs parents disparaissent, elles demeurent seules, bien décidées à survivre. Il leur reste, toujours vivantes, leurs passions de la danse et de la lecture, mais face à l’inconnu, il va falloir apprendre à grandir autrement, à se battre et à faire confiance à la forêt qui les entoure, emplie d’inépuisables richesses.

Et c’est bien ?
Un bouquin que je voulais lire de longue date et que j’ai enfin sorti de ma PaL. Si je comprends ce qui a fait son succès, et plus encore aux US dans les années 90, je ne peux pas dire que ce texte ait été un coup de coeur pour moi.
La première moitié est très contemplative et immobile. C’est voulu et ça a sa logique, mais c’est particulièrement lourd et je me suis longtemps demandé ce qui rattachait le texte au fameux nature writting. On s’enlise avec les deux filles dans un quotidien gluant, comme elles sans vision de ce qui se passe, l’ensemble émaillé de souvenirs de leur vie avant effondrement.
J’ai trouvé la seconde moitié du texte beaucoup plus intéressante ; les deux héroïnes cessent d’attendre que les choses reviennent « à la normale » et se bougent (enfin) les fesses. On peut imaginer que le mode de vie occidental ne les a pas aidées à prendre les choses en main, habituées à un confort qui coule de source, mais je dois avouer que pour deux jeunes personnes approchant de la vingtaine, j’ai eu du mal à comprendre qu’elles restent inactives aussi longtemps. Une prise de conscience vient un peu faire bouger tout ça – à mon grand soulagement -, prise de conscience forcée par un événement que j’ai trouvé particulièrement mal mis en scène : cela arrive comme ça, comme un cheveu sur la soupe.
Les pages nature deviennent davantage présentes, bien plus intéressantes, superbes – utiles au roman et instaurant un retour aux sources, à une vie en prise avec un vrai réel. Les pages sur les femmes, la féminité, la maternité (même si argh, l’accouchement j’avais envie de secouer Nell, mais fouuuuuuuus la paix à ta soeur ) sont vraiment très chouettes aussi. Le style fait peu à peu basculer le lecteur avec les deux filles dans une forme de conscience immédiate de l’environnement, dans une reconnexion avec ce qui nous entoure particulièrement salvatrice.
Le déroulé du roman et le ré-ensauvagement des filles m’a fait penser, au fond, à un Appel de la forêt version être-humain, le glissement vers la fin est vraiment bien rendu. Je regrette juste que des maladresses se soient glissées ici et là. Je pense que ce qui a dû frapper, avec ce roman, c’est la réaffirmation de l’être humain en tant qu’animal et partie intégrante de la nature et la remise en cause de la société de consommation. Le contexte US et années 90 dans lequel le roman est paru a dû être encore plus marquant, même si le propos est encore largement pertinent aujourd’hui, y compris en France. Il s’agit d’un texte marquant quand on commence à s’interroger sur l’écologie, la consommation, la place de l’humain.
En ce qui me concerne, on n’est pas sur un coup de coeur en raison de l’intérêt en dents de scie que j’ai trouvé au texte. Et j’avoue que les thèmes et ce genre de réflexion me sont familiers, donc ils ont peut-être moins eu l’effet « coup de poing » escompté. Néanmoins la seconde moitié et cette glissade presque hypnotique dans ce que j’appellerais « le sauvage » m’ont vraiment happée, et rien que pour cela, je pense que le livre vaut le détour. Pas un coup de coeur, mais une très bonne lecture malgré tout.









