Publié dans Fantastique

Le tour d’écrou de Henry James

De quoi ça parle ?

Existe-t-il plus grand plaisir que d’écouter des récits macabres, la veille de Noël, dans une vieille maison isolée ? Qu’il est diabolique le frisson qui glace alors les sangs… Qu’il est divin le cri des femmes épouvantées… Ce ne sont pourtant que des histoires… Tandis que celle-ci… Elle a été vécue… Par des enfants encore, deux petits orphelins, si admirablement gracieux, si serviables et si doux… Et leur gouvernante, une jeune fille des plus honnêtes. Ce qu’ils ont vu, ce qu’ils ont enduré et les circonstances extraordinaires des événements qui les ont… Mais non ! c’est trop horrible… Ça dépasse tout… en pure terreur ! Car le pire, c’est de savoir que, justement, on ne saura jamais tout…

Et c’est bien ?

Pour tout vous dire, un premier flop de 2021.

Pourtant, la langue est belle. J’aime particulièrement ces tournures de phrases et ce vocabulaire que je retrouve souvent dans les récits fantastiques du 19e siècle. Mais c’est sûrement le seul point qui m’aura été agréable dans cette lecture laborieuse et éprouvante.

Nous sommes ici en présence d’une histoire de fantômes, ou en tout cas on le suppose. Ficelles habituelles du récit fantastique, le lecteur se demandera si la gouvernante, narratrice de sa propre histoire, cherche bien à toute force à protéger les deux chérubins dont elle a la garde, ou si elle a complètement viré dans une espèce de psychose paranoïaque. Essence du récit fantastique également le fait que le lecteur ne sache pas tout.

Le lecteur passe son temps à questionner ce qui se passe et ce qui s’est passé. Y a-t-il des fantômes ? Des fantômes de deux anciens employés ayant côtoyé les enfants ? On s’interroge aussi beaucoup sur le garçon, Miles. Renvoyé de l’école, on ne saura jamais pourquoi. La narratrice fait état de deux enfants exquis, exempts de tout mal et s’étonne du renvoi de Miles. On apprend également que le jeune garçon passait beaucoup de temps avec l’ancien valet, dont le fantôme semble hanter la demeure. Que faisait-il ? Mystère, on ne peut que supposer, et l’esprit humain va chercher des réponses dans des activités peu avouables, que l’on pourra également questionner quant au renvoi mystérieux de l’établissement scolaire. Dès lors, la gouvernante cherche à le protéger, à le détourner. De quoi, mystère encore, on oscillera d’un bout à l’autre entre les fantômes et les activités supposées.

Certes, ces aspects de doute, d’éléments sur lesquels on ne peut jamais trancher sont intrinsèques au fantastique. Néanmoins, si j’ai pu apprécier cela dans de nombreux récits en grande amoureuse de Poe ou de Maupassant pour ne citer qu’eux, en revanche dans Le Tour d’écrou, ces éléments sont venus donner un tour laborieux à l’histoire. L’auteur passe sont temps en non-dits, en circonvolutions, en évitements – trop et trop longtemps -, et je dois dire que cette narration m’a rapidement fatiguée, agacée, énervée. La lecture m’est rapidement devenue désagréable, pour finir complètement à plat et de manière particulièrement abrupte. Là encore, certainement que l’intension était de laisser turbiner le lecteur, j’en suis restée, pour ma part immensément frustrée.

A lire si :
– vous appréciez les récits 19e
– vous souhaitez lire du fantastique, du vrai
– la frustration ne vous fait pas peur

Note : 2 sur 5.
Publié dans Fantastique, Nouvelles

L\’autre moitié du ciel, Sara Doke

Résumé : L’autre moitié du ciel donne la parole à celles que les mythes ont oubliées et pose les fondations d’un matriarcat imaginaire. Ici, les Princesses ne se morfondent pas en attendant le Prince Charmant, elles ont leurs propres combats à mener, à gagner. Ce sont des héroïnes. Des filles. Des femmes. Des mères. Des sorcières. Des guerrières…
Et toujours des rebelles.

Avis : L\’autre moitié du ciel est un recueil de nouvelles féministes, mettant en scène des femmes, leur vie, leur combat. Le panel de textes proposé et les tons abordés sont variés, les thèmes le sont aussi. Tous les textes ne m\’ont pas forcément parlé et je ressors de cette lecture plutôt mitigée.

Si je ne devais parler que d\’une nouvelle, ce serait sûrement de la première, La femme du miroir. Peu importe mon ressenti général sur le recueil, je ne regrette absolument pas de l\’avoir lu, rien que pour ce texte. Ce dernier est très court, à peine quelques pages, mais il a trouvé en moi un écho et je dois dire que cette lecture m\’a bouleversée.

Il met en scène une femme et son reflet, et donne lieu à toute une observation, toute une réflexion sur le corps. On s\’en détache, on s\’observe. Le corps devient un autre personnage, une autre entité. Sont abordés les injonctions qui pèsent sur le corps d\’une femme, le poids de son regard, le poids de celui des autres, de leurs réflexions ; le fait d\’aimer – ou non – son corps, et la force que l\’on peu en retirer.

Ce texte a résonné très fort en moi pour de nombreuses raisons, et je pense que c\’est un texte-baume à faire lire à toutes les femmes. C\’est une ode au corps, une ode à soi-même, une ode au véhicule de notre âme. J\’en ai été véritablement chamboulée.

Si les autres nouvelles sont sympathiques, elles m\’ont beaucoup moins plus pour des raisons variées. De quelques unes ressort une forte impression onirique, une narration qui plonge le lecteur dans du coton, une brume, un côté un peu mystique avec pas mal de références aux mythes. C\’est le genre de narration qui me perd, souvent, car mon esprit s\’égare et se détache complètement de ce qui est raconté, j\’en perds le fil, et par la même occasion l\’intérêt que je pourrais porter au texte.

D\’autres textes sont plus terre-à-terre, mais leur longueur ou la manière dont les thèmes sont abordés m\’ont laissée sur ma faim. J\’aurais aimé davantage \ »à manger\ » sur les réflexions posées, même si en général les textes en eux-mêmes sont assez drôles (et souvent un brin cyniques).

En soi je ne ressors par transcendée de cette lecture. Par contre, si l\’occasion s\’offre à vous, lisez La femme du miroir.

Publié dans Fantastique, Jeunesse

L\’étrange vie de Nobody Owens – Neil Gaiman

Résumé : Nobody Owens est un petit garçon parfaitement normal. Ou plutôt, il serait parfaitement normal s\’il n\’avait pas grandi dans un cimetière, élevé par un couple de fantômes, protégé par Silas, un être étrange ni vivant ni mort, et ami intime d\’une sorcière brulée vive autrefois. Mais quelqu\’un va attirer Nobody au-delà de l\’enceinte protectrice du cimetière : le meurtrier qui cherche à l\’éliminer depuis qu\’il est bébé. Si tu savais, Nobody, comme le monde des vivants est dangereux…

Résumé : Plongée dans le monde très burtonien de Neil Gaiman à travers les aventures de Nobody Owens. J\’ai retrouvé avec plaisir cette ambiance qui m\’avait beaucoup plus dans Neverwhere, un brin glaçante, où les personnages de conte de fée ont des crocs et vous font dresser les cheveux sur la tête.

J\’y ai également retrouvé cette narration simple et très \ »graphique\ » dans sa manière de mettre en scène les lieux, les personnages, les actions, mâtinée d\’humour parfois au vitriol ; une narration qui évoque avec succès l\’ambiance brumeuse et lugubre de l\’accueillant cimetière de Nobody. Côté imagination et clins d\’oeil, on est servi, l\’auteur se fait plaisir avec les épitaphes des tombes, les énergumènes que celles-ci abritent, des trésors et des méchants aux longs couteaux.

Vampires, vouivres, fantômes, goules, sorcières, tout est là pour un conte à la fois glaçant et chaleureux, à lire emmitouflé dans son pull avec une bonne tasse de thé à portée de main lors d\’une soirée de Toussaint.

Quant à l\’histoire en elle-même, on a là une fort sympathique aventure, celle de Nobody qui découvre les embûches du monde des morts… mais aussi celles du monde des vivants, accompagnées de leur lot de personnages truculents.

Je reste cependant légèrement sur ma faim en ce qui concerne le dénouement de l\’histoire, que j\’ai trouvé un peu trop facile. Les Jack étaient une trouvaille assez chouette, je regrette qu\’ils aient été si peu exploités tout au long de l\’histoire, de même que je regrette que l\’idée générale paraisse un peu brouillonne : au final, on ne sait pas bien qui ils sont, ni pourquoi ils font ce qu\’ils font… alors que toute l\’histoire repose sur les actes de l\’un d\’eux. L\’auteur avait sûrement une idée précise, mais la façon dont cela a été mis en scène m\’a paru confuse.

En soi donc, une aventure fort sympathique et particulièrement distrayante, qui tire surtout sa force de l\’atmosphère, de l\’ambiance que l\’auteur tisse autour du lecteur… Même si, dans le même esprit, je lui ai davantage préféré Neverwhere, que j\’ai trouvé plus abouti.

Se grignote au coin du feu…
Publié dans Fantastique

Dracula – Bram Stocker

Résumé : Jonathan Harker, jeune notaire, est envoyé en Transylvanie pour rencontrer un client, le Comte Dracula, nouveau propriétaire d\’un domaine à Londres. A son arrivée, il découvre un pays mystérieux et menaçant, dont les habitants se signent au nom de Dracula. Malgré la bienveillance de son hôte, le jeune clerc ne peut qu\’éprouver une angoisse grandissante. Très vite, il se rend à la terrifiante évidence: il est prisonnier d\’un homme qui n\’est pas un homme. Et qui partira bientôt hanter les nuits de Londres…
Avis : Un classique que j\’ai tenté de lire il y a des années, sans vraiment accrocher. L\’aspect journal intime et épistolaire m\’avait paru difficile d\’accès. Je me suis replongée dedans à l\’occasion du Pumpikng Autumn Challenge de Guimause. Pas prévu au programme, mais quand on m\’invite fort sympathiquemet à une lecture commune, je suis toujours partante.
Plongée donc, dans l\’univers gothique de Bram Stocker, sombre à souhait. Je ne m\’attendais pas un livre d\’épouvante – je suis une froussarde qui ne regarde jamais de film d\’horreur – pour tant, les frissons se sont invités… avec un certains plaisir, je dois l\’admettre. L\’ambiance Carpathe dans le château du comte, ses loups, ses nuits et ses songes hallucinés m\’ont énormément plu, le tout mâtiné d\’un style d\’écriture désuet mais particulièrement agréable. 
Le retour en Angleterre m\’a paru tout aussi chouette : découvrir Mina, les déboires de Lucy, les nuits hantées par les cauchemars et les chauve-souris inquiétantes, les garçons au chevet de la demoiselle. Bon, je sais, c\’est l\’époque paraît-il, mais côté place de la femme, on repassera. Il serait malhonnête de fustiger le livre en y appliquant mon regard du 21e siècle… mais certains passages sur les faibles femmes m\’ont néanmoins un rien fait fumer les naseaux. Ah tient, et parlant idées d\’hier, mention spéciale aux soins appliqués, qui m\’ont bien fait rire : entre le verre de vin après un don du sang, ou l\’application de Brandy sur la demoiselle évanoui… je n\’ai pu m\’empêcher de sourire. 
Un milieu d\’histoire un brin en-deçà du reste m\’a un peu fait décrocher, quelques longueurs y sont certainement pour quelque chose. Et puis regain d\’intérêt sur les dernières pages, lorsque la traque est engagée. En soi, un classique que j\’ai particulièrement apprécier de lire – enfin – et qui me fait constater à quel point il a marqué le cinéma et la littérature. 
C\’est du bon !
Publié dans Fantastique

Le songe d\’une nuit d\’octobre – Roger Zelazny

Résumé : Ce sera pendant l\’horreur d\’une profonde nuit, la dernière d\’octobre. La lune sera pleine. On a un mois pour préparer le Jeu. Pour collecter les outils, déjouer les plans de ceux de l\’autre camp, trouver l\’endroit magique…L\’enjeu est de taille : si ce sont les ouvreurs qui gagnent, alors les Anciens Dieux reviendront, et je ne vous dit pas la catastrophe !
Moi, Snuff le chien, je vous assure que je ne chôme pas. Entre mes rondes et les informations que je dois récolter, j\’estime que je fais bien mon boulot. Notez, la chatte grise se débrouille bien aussi. Mais de quel bord est sa maîtresse ? That is the question…
Avis : Retour à mes premières amours SFFF : l\’auteur Roger Zelazny. Un court roman comme il sait si bien les faire : simple, rapide à lire… et vraiment très, très plaisant à lire.

Notre \ »héros\ », Snuff, est le familier d\’un certain Jack. Snuff assite Jack dans ses mystérieux préparatifs en vue d\’un Jeu qui aura lieu dans la nuit du 31 octobre. Si l\’on connaît un peu le principe de la Samain, on devine aisément et rapidement en quoi consistera le fameux Jeu.

En revanche toute l\’histoire tient à ces préparatifs. Les espionnages, les commérages, les alliances et rivalités, le fait de savoir qui est dans quel camp, l\’idée de ne pas se faire prendre, parce que mine de rien, le village paisible où tout le monde s\’est installé n\’a rien demandé.

Une histoire que l\’on traverse vite. Pas forcément la meilleure que Zelazny ait pu écrire. Mais disons-le clairement : s\’éclate. Ca complote dans tous les coins, et ça fourmille de clins d\’oeil aux grandes oeuvres de littérature.

A grignoter tranquillement ; une histoire qui fait particulièrement du bien après une journée bien chargée.

Se grignote sans faim