Publié dans Science-fiction

La Dispersion des ténèbres (Le Livre de Cendres, tome 4) – Mary Gentle

Résumé : Après la mort de Charles le Téméraire, la Bourgogne a désormais une duchesse, dernier rempart contre les Machines sauvages et leur noir dessein. Mais la fin semble proche, et Dijon ne devrait plus tarder à tomber : presque plus de nourriture, quinze mille Wisigoths – et le roi-calife de Carthage en personne ! – aux portes de la ville. Sans l\’aide du Golem de pierre, seule une idée désespérée pourra sauver la ville, ou c\’en sera finit de l\’humanité tout entière. 
Avis : Quatrième et dernier volet du Livre de Cendres, La Dispersion des ténèbres offre au lecteur le dénouement des pérégrinations de notre héroïne mercenaire. C\’est avec un plaisir anticipé que l\’on se plonge dans ce quatrième tome, puisque c\’est ici que les questions trouveront des réponses. 
Nous laissions donc Cendres et Florian, à la fin de l\’opus précédent, aux prises avec la noblesse bourguignonne, et apprenions que si Cendres et sa jumelle, la Faris, étaient des \ »faiseuses de miracles\ », la lignée des ducs de Bourgogne en était l\’antithèse, des \ »empêcheurs de miracles\ » maintenant cohérente la réalité. C\’est donc à Floria Del Guiz, médecin de guerre de la troupe de Cendres, qu\’échoit la lourde de tâche de maintenir la Bourgogne, et par la même occasion, de maintenir la réalité du reste du monde face aux Machines sauvages. Dans ce quatrième tome, le lecteur assiste donc à la lutte acharnée de Cendres et de l\’armée de Dijon pour maintenir en vie leur duchesse, et tenter de convaincre les Wisigoths qu\’ils mènent une guerre qu\’ils ne comprennent pas. 
Avec autant de virtuosité que pour les livres précédents, Mary Gentle, à force de coups d\’éclats et de rebondissements royalement maîtrisés, distille au compte-goutte les explications de nombre de questions : pourquoi la Bourgogne ? Quel est le rôle de Cendres ? De Floria ? Que devient la Faris, destituée de son rôle de général par le roi-calife de Carthage, venu en personne ? Que vont devenir Olivier de la Marche, la compagnie du Lion Azur ? Durant tout le siège de Dijon, les passages plus lents sont brillamment articulés à des paragraphes plus spectaculaires (la sortie des Bourguignons, magistralement décrite), faisant progressivement monter la tension, jusqu\’à l\’apogée des événements. 
Chacune des révélations est amenée avec brio, et titille toujours plus la curiosité du lecteur, qui se demandera plus d\’une fois comment se fera la jonction avec les recherches \ »modernes\ » de Ratcliff. Jusqu\’au bout, l\’auteure maintient l\’avidité du spectateur… qui sera amplement récompensé par un dénouement de toute beauté, véritablement bien pensé, surtout sur le plan du jeu avec les réalités. Il faudra sans doute s\’accrocher un peu pour bien comprendre tous les tenants et aboutissants, mais, comme elle l\’a fait tout le long des tomes, c\’est avec adresse que Mary Gentle s\’en sort : des situations complexes, expliquées subtilement, sans grands paragraphes indigestes, mais exposées petit-à-petit afin de permettre au lecteur de digérer au fur-et-à-mesure et de construire sa représentation des événements. 
En somme, une clôture de l\’histoire de Cendres admirablement réussie, et d\’une qualité égale aux livres précédents. Le Livres de Cendres est véritablement une saga riche, dense et aboutie. A découvrir absolument !

Appréciation

Coup de coeur
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Les Machines sauvages (Le Livre de Cendres, tome 3) – Mary Gentle

Résumé : Cendres a réussi à échapper au roi-calife de Carthage et aux Machines sauvages. Malgré tout, la menace pèse toujours sur elle, sur la Bourgogne et sur le reste de la Chrétienté. D\’autant qu\’à Dijon, la rumeur prétend que le duc Charles est au plus mal. Les Wisigoths, menés par la Faris, vont bientôt venir à bout des remparts de la ville, et la fuite semble à Cendres la seule issue possible. Pourtant, une question continue de hanter la jeune mercenaire : pourquoi la Bourgogne ? 
Avis : Avec un peu de retard, voici un petit compte-rendu de lecture du troisième tome du Livre de Cendres. Le tome 2 laissait le lecteur sur la fuite de Cendres, sur ses retrouvailles avec sa compagnie, et sur sa décision de se séparer temporairement du comte d\’Oxford. Ce dernier, suivant le conseil de notre héroïne, se mettant en route afin de demander l\’aide des ottomans contre Carthage, et Le Lion Azur montant au nord, afin de récupérer une partie des hommes de la compagnie restés à Dijon. 
Ce tome trois marque donc le retour de Cendres en Bourgogne. Le lecteur y retrouve la Faris, le harif Aldéric, un Wisigoth pas aussi antipathique que les autres, les golems guerriers, et surtout, les murailles de Dijon. Sans réelle surprise, la rédaction de cet ouvrage est d\’aussi excellente qualité que les deux autres tomes, même si ce Livre 3 n\’est cependant pas exempt d\’une ou deux longueurs. Les temps forts sont moins nombreux ; en revanche, l\’auteure passe plus de temps à narrer l\’organisation de la défense de Dijon, et à présenter les prochains personnages importants : les soldats bourguignons, dont Olivier de la Marche, pour lequel le lecteur se prendre sans doute de sympathie. 
Une fois de plus, les apports historiques de la part de Mary Gentle sont très nombreux, et ajoutent une touche de réalisme à l\’histoire, surtout en ce qui concerne la description des conditions de vie durant un siège et des relations entre les différents protagonistes. 
Les coupures marquées par les échanges entre Ratcliff et sa directrice de recherche se font plus rares qu\’elles ne l\’étaient dans les tomes précédents, mais laissent néanmoins présager, en sus de l\’histoire, d\’éventuels rebondissements qui feront sans doute frémir le lecteur d\’impatience, s\’il prête attention à certains détails. 
Notons cependant que, malgré un retour à une histoire plus posée, Les Machines sauvages recèle tout de même quelques surprises, dont une scène de clôture de tome magistrale. Une troisième partie qui ne dépare donc pas les débuts de cette histoire. 

Appréciation

Excellent !
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La Puissance de Carthage (Le Livre de Cendres, tome 2) – Mary Gentle

Résumé : Prisonnière à Carthage, où le soleil ne brille plus depuis longtemps, Cendres n\’a jamais été aussi près du Golem de Pierre. Pourtant, simple esclave, sa vie ne tient plus qu\’à un fil. Au plutôt au bon vouloir des amirs wisigoths. Ceux-ci, et leur Faris, ont presque achevé leur croisade contre la Chrétienté et seule la Bourgogne leur résiste encore. Prête à tout pour survivre et retrouver la compagnie du Lion, Cendres découvrira-t-elle le secret de ses voix ?
Avis : Ce deuxième tome du Livre de Cendres s\’ouvre sur la captivité de Cendres et narre aux lecteurs sa captivité, ainsi que sa découverte de la capitale wisigothe, Carthage. On y découvre les intrigues politiques des \ »ennemis de la Chrétienté\ », et surtout, le fameux Léofric, possesseur du Golem de Pierre et \ »créateur\ » de la Faris, le capitaine de l\’armée wisigothe, par l\’intermédiaire d\’un élevage d\’esclave.

Le premier tome laissait un peu les lecteurs sur leur fin, en leur proposant une histoire travaillée et de qualité, mais un peu trop statique. Ce deuxième tome, plus dynamique, permet à la tétralogie de prendre son essor, et entraîne le lecteur dans une série d\’événements passionnants et cruels. Le devenir de Cendres au sein de la maison Léofric est de plus en plus incertain, et il apparaît que son sort sera également lié aux intrigues politiques des grands seigneurs.

Certaines scènes sont assez dures, et la prose de l\’auteure parvient à merveille à plonger le lecteur dans les mêmes affres que Cendres ; la peur et la détresse, le désarroi de trouver des amis chez ses ennemis, l\’allégresse des combats. Porté par une plume précise et cultivée, mais également fluide et agréable à suivre, le texte narre les aventures de l\’héroïne aux cheveux d\’argent avec maestria.

De nouveaux personnages font leur apparition – l\’amir Léofric, le harif Aldéric, quelques soldats, des esclaves avec lesquels Cendres va se lier – , on en retrouve, qu\’on avait quittés à Auxonne, à la fin du Livre 1. Je ne résiste pas au plaisir de vous révéler que l\’on retrouve brièvement le comte d\’Oxford, John de Vere, que j\’apprécie particulièrement. Et à chaque fois, c\’est avec le même plaisir qu\’on les suit, chacun avec ses contradictions, ses interrogations, les problèmes liés à sa condition. En parallèle, l\’évolution des découvertes de Ratcliff et les déboires qu\’il rencontre renforcent encore l\’envie d\’en savoir plus : on sent qu\’il y a anguille sous roche auprès des autorités militaires quant à la découverte de ce pan de notre \ »histoire\ » qu\’est celui de Cendres, et qui ne devrait pas exister…

Mary Gentle distille avec brio le fruit de ses recherches, sans assommer son lectorat de termes et de précisions historiques. L\’ensemble est au contraire intégré au quotidien des personnages, de manière à apporter un vrai plus dans les passages importants – ceux des batailles notamment -, sans donner l\’impression d\’assister à un cours d\’histoire, et les éléments les plus obscurs sont expliqués simplement. C\’est avec le même talent que l\’auteure met en scène des personnages humains, pas manichéens, gouvernés par leurs émotions, hantés par leurs démons, montrés autant dans leurs aspects les plus crasses que dans leurs aspects victorieux.

En somme, un tome 2 intéressant, dynamique… brillant, qui répondra à quelques unes des questions posées dans le tome 1, mais amènera chez le lecteur – et les héros de ce récit – de nouvelles interrogations. Le premier tome laissait présager d\’une bonne saga, le deuxième tome le confirme : Le Livre de Cendres est un récit de très bonne facture, à découvrir de toute urgence !

Appréciation

Coup de coeur
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La Guerrière oubliée (Le Livre de Cendres, tome 1) – Mary Gentle

Résumé : 1476. Gênes est à feu et à sang. Les Carthaginois et leurs golems maléfiques ont envahi le sud de l\’Europe afin de détruire l\’empire de Frédéric de Habsbourg. Une nuit éternelle les accompagne. Rien ni personne ne semble en mesure de les arrêter. Pourtant, une femme de dix-neuf ans, capitaine d\’une troupe de mercenaires, va se dresser sur la route de l\’envahisseur. L\’histoire a oublié cette guerrière au visage couturé et aux cheveux trop blonds. Elle s\’appelait Cendres, et la légende dit qu\’elle était plus farouche que le lion et guidée par la voix d\’un saint. 
Avis : Voici venir la critique d\’une saga qui m\’interpellait depuis longtemps : Le Livre de Cendres, une uchronie basée sur la fin de  notre XVe siècle, et sur laquelle j\’avais pu lire des critiques élogieuses. A travers cette histoire, Mary Gentle imagine le travail d\’un universitaire, Pierce Ratcliff, qui aurait découvert l\’existence d\’une guerrière femme oubliée par l\’Histoire avec un grand H. Et c\’est le travail de cet universitaire que le lecteur est invité à lire. 
La trame du récit prend ainsi pied dans notre histoire réelle, comme toute uchronie qui se respecte, et met en scène une \ »Europe\ » envahie par une armée wisigothe, aidée d\’une magie ou technologie étrange : les golems. Cendres, capitaine d\’une troupe de mercenaire au service de l\’empire Habsbourg, va être confrontée à cette armée, et à son chef, qui présente de nombreux et étranges points communs avec elle. Dans cette histoire, l\’auteure mêle avec succès une trame de fond historique soignée, travaillée et documentée, et la fiction ; sans cependant tomber dans le rébarbatif. Les quelques mails échangés entre Ratcliff et sa directrice de recherche éclairent avec subtilité le lecteur sur les points qui ne font pas partie de notre histoire, chose nécessaire tant le fil principal est travaillé avec brio.

Les personnages sont tout aussi réussis. Cendres, la femme mercenaire, la chef, confrontée à une société d\’homme, un environnement violent, habitée par des voies qui lui indiquent comment agir sur le champ de bataille, possède une réelle présence et un caractère suffisamment frappant pour en faire une \ »vraie\ » figure historique. Godfrey, le prêtre informateur, Florian, le chirurgien, Angelotti, le canonnier, ou encore Robert Anselm, le bras droit de Cendres ; sont autant de personnages auxquels l\’on s\’attache. La troupe des mercenaires et son quotidien contribuent à donner toute sa dimension et sa crédibilité à l\’histoire.

Le style traduit lui aussi le travail de l\’auteure et la qualité du texte. Véritable instrument, Mary Gentle sait donner à sa plume des tons et des formes différentes pour s\’accorder aux différents documents \ »historique\ » que Ratcliff traduit peu à peu. Les premières pages sont laborieuses et comme déconnectées du reste de l\’ouvrage. Le corps du texte, quant à lui, se lit plus aisément. Efficace, précise, imagée, riche, la prose de Gentle est agréable à découvrir et sert tout à fait l\’histoire qu\’elle propose à son lecteur, et l\’aspect \ »travail de recherche historique\ » est exploité avec talent.

Le seul \ »défaut\ » – qui n\’en est pas vraiment un – du récit restera sans doute sa lenteur. Tout au long du texte, on sent que ce premier tome sert principalement à jeter les bases de ce qui va suivre. Et si c\’est avec plaisir que l\’on découvre qui est Cendres et dans quel contexte troublé elle va devoir évoluer, on éprouve cependant des difficultés à rentrer totalement dans l\’histoire, à s\’y investir, à s\’y plonger.

Un ouvrage assez particulier donc, mais de réelle qualité. A conseiller aux bons lecteurs, ou en tout cas, à ceux qui n\’ont pas trop peur de se lancer dans un premier tome un peu lent.

Appréciation

Excellent !